MARATHONIEN

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Le 8 avril 2018, sur les Champs Elysées 50000 personnes s’élancent pour le Marathon de Paris. Des membres de VEGAN MARATHON, la plus grande équipe de runners véganes et végétariens, sont venus des 4 coins de la planète pour courir, ou pour participer à la CHAÎNE HUMAINE VEGAN MARATHON. Les runners dévalent l’avenue, tandis qu’une une voix dans un mégaphone répète inlassablement : « VEGAN MARATHON, AIO, …. VEGAN MARATHON, AIO, …. VEGAN MARATHON, AIO, …. ».

LA DEFAITE N’EST PAS UNE OPTION

Un an plus tôt, le 9 avril 2017, 57000 coureurs et 250000 spectateurs convergent vers le parcours du marathons de Paris. Les militants de la cause animale tractent dans les métros parisiens. Depuis bientôt 11 mois, je me prépare à cette course. J’ai filmé toute la préparation en vue d’un film documentaire intitulé FINISHER – VEGAN MARATHON. Je me suis équipé d’un caméra sportive pour filmer l’épreuve de l’intérieur, et une dizaine de caméras m’attendent sur le parcours pour immortaliser ma progression. Pierre-Marie, le chef opérateur se déplace en solitaire, caméra à l’épaule. Nous avons prévu également un dispositif de tournage autour de mes supporters. La plupart des associations liées à la cause animale ou au végéta*isme nous soutiennent. K&M est au départ. Le Collectif contre l’Expérimentation et l’Exploitation Animale (CCE2A) a programmé d’être au départ, à l’arrivée et à Bastille, tout comme 269 Life France. L214 doit se placer au 13e et au 30ème km ainsi qu’à l’arrivée.
Le choix du 30ème km n’est pas innocent puisqu’il symbolise le mur du marathon, un phénomène physiologique qui intervient généralement entre le 30ème et le 35ème kilomètre de course. Il correspond à l’épuisement des réserves de glycogène, une défaillance physique assimilable à un coup de pompe, ce qui provoque le plus grand nombre d’abandons. Ce mur du marathon est une de mes hantises depuis plusieurs mois. J’ai du mal à régler mon alimentation par rapport à ce problème.

L’Inspiration

 A l’origine du projet, je pesais 140 kg, je faisais des apnées du sommeil potentiellement mortelles et de l’hypertension. Très sportif dans ma jeunesse (et quelques médailles à mon actif), j’ai toujours souhaité participer à un marathon. Je m’imaginais en finisher du Marathon de New-York, mais suite à un accident, puis à deux greffes d’organes, j’ai arrêté le sport. Je ne pensais pas m’y remettre un jour.
En 2013, j’ai suivi avec intérêt l’aventure de Janette et Alan Murray, qui deviendront plus tard ambassadeurs Australiens de VEGAN MARATHON. Le couple âgé respectivement de 64 et 68 ans, a couru un marathon par jour pendant 366 jours consécutifs, soit plus de 15000km en un an, le tour de l’Australie. Un record du monde d’autant plus formidable, que Janette avait survécu à un cancer du sein, à la surprise du corps médical qui ne lui donnait que 6 mois à vivre. Heureusement que les médecins se trompent parfois. C’est aussi ce qui m’est arrivé, quand à 36 ans ils m’ont prédit 10 ans à vivre. Comment ne pas faire le parallèle avec l’expérience de Janette ? Deux ans avant l’échéance fatidique, j’ai décidé de réagir. Engagé dans la cause végane depuis 2012, je me suis dit que ce serait formidable de courir le marathon de Paris pour sensibiliser à la cause animale. Une motivation supplémentaire ça ne pouvait pas me faire de mal. Et puis franchement, je n’aime pas trop les donneurs de leçons, je préfère la valeur de l’exemple. J’ai la conviction que pour changer le monde, il faut se changer soi-même et j’ai du pain sur la planche. Le 9 avril 2017, au moment de franchir la ligne de départ, j’ai l’impression d’entamer mon 9000ème marathon. Les comptes sont vite faits, un marathon par nuit depuis 25 ans. Les apnées du sommeil, les micros réveils et les courbatures, la fatigue le lendemain sont bien les plus terribles des marathons.

Onze mois de préparation

Thierry Pistorozzi est un ami, un champion, un coach sportif et un des conseillers techniques de VEGAN MARATHON. Il a tout de suite soutenu le projet. Son entraînement commence en mai 2016, par une minute de course et une minute de marche, une minute de course, etc. Le marathon de Paris est loin, quasi inaccessible. Je doute d’y arriver un jour. Mes deux filles ont joués un rôle capital dans cette remise à niveau. Ariakina, la cadette Ariakina n’aime pas la course à pied, pourtant elle mouille le maillot et vient s’entrainer avec moi. Sa volonté me donne l’élan nécessaire pour amorcer la préparation. Ondalina ma fille aînée, étaient plutôt en rondeurs dans son enfance. Elle s’est mise au sport toute seule, et a opéré une transformation incroyable. J’ai toujours aimé les guerrières. Il y a quelques années, j’ai réalisé « Maquisardes », un documentaire sur les résistantes pendant la Seconde Guerre mondiale. Mon épouse, ma mère, et ma grand-mère sont de cette trempe là, pas surprenant que mes filles soient des combattantes.

La fracture du pied

Mon métier est très chronophage, j’aurai pu prendre cette excuse pour me soustraire à cette torture permanente, mais je ne l’ai pas fait. Je n’ai pas manqué un seul entraînement (sauf quand j’ai eu la grippe qui m’a cloué au lit, et au moment de la fracture du pied). La défaite n’est pas une option, c’est ce que je me dit chaque matin en me réveillant, épuisé à cause des apnées du sommeil. Je cours par tous les temps, de -10° l’hiver à + 35° l’été.  Une fois passé les 10 premiers mois de « remise en forme », nous commençons une préparation spécifique marathon de 12 semaines, allant jusqu’à 100 km par semaine de course à pied. Le travail du coach pour m’emmener jusqu’à ce niveau est proprement incroyable, je dois être capable de courir 6 heures d’affilés, et ce n’est pas une mince affaire.

Je suis content de ma progression, mais les dieux du stade sont facétieux, et ils me réservent une épreuve inattendu. Trois semaines avant le marathon, lors d’un entrainement, mon pied droit heurte un trottoir, avec une belle fracture à la clef. Je continue l’entrainement pendant 10 jours mais ma dernière course longue de 30 km est un calvaire de 4 heures. Mon pied est dans un tel état que je doute de ma capacité à participer au marathon.

Le programme spécial marathon se solde par une semaine de repos. La douleur s’étant un peu atténuée, je décide d’aller au bout de mon challenge. L’avant-veille de la course, je vais au salon du running pour récupérer mon dossard. Le salon est passionnant et je rencontre des personnes formidables. Le problème, c’est qu’a la fin de la journée je n’arrive plus à marcher tant j’ai piétiné. La douleur de la fracture est terrible.
La toile s’est enflammée en apprenant ma blessure. Certains pensaient que j’étais inconscient de courir avec un pied cassé, d’autre écrivaient que je devais aller au bout. Il n’y a rien à faire concernant une fracture si ce n’est du repos, et ça impliquait de jeter aux orties des mois de dur labeur, impossible de mon point de vue. Enfin et surtout, j’avais embarqué beaucoup trop de monde dans cette aventure pour revenir en arrière. Les associations avaient confectionné des banderoles, des affiches, des badges, je ne me voyais vraiment pas leur faire défaut.
La veille du marathon j’ais une dernière course d’entrainement à faire. Symboliquement nous l’a courons avec Ariakina. Elle était là au début et à la fin. 20 minutes, qui sont très longues et confirment mes craintes, la douleur allait m’accompagner jusqu’au bout du challenge. Le pied me lance, il est trois heures du matin je suis assis dans le lit les yeux grands ouverts comme un hibou.

Le début de la course

A 8h45 je rentre dans la zone coureurs par le sas vert. Ici de nombreux coureurs guettent un rayon de soleil, certains sont déguisés, un couple avec un haut de forme et un voile portent un tee-shirt où est inscrit « 42,195, notre cadeau ». Je vois un vegan que je connais, Chris un runner anglais, puis je rencontre une dizaine de runners véganes, tous me connaissent mais je n’en connais aucun. Je me dis que c’est bien d’avoir médiatisé VEGAN MARATHON de la sorte. Mon pied me fait mal, et la station statique n’arrange rien. L’heure du départ arrive. Je me trompe de sas, et quand je pars il est 9h41. Je pars vite, et j’aborde la rue de Rivoli rapidement. Il doit faire dans les 15°C et même si la température est idéale, un nombre important de coureurs longent le côté gauche de la chaussée rue de Rivoli, protégés du soleil. J’ais promis à l’équipe de tournage de courir toujours à droite, mais je me résigne à rejoindre le côté gauche, après tout il ne doit y avoir personne de mon équipe jusqu’à Bastille. Ce que je ne savais pas c’est que des dizaines de supporters véganes, végétariens et animalistes, allaient se mettre sur le bord de la route entre Concorde et Bastille pour m’encourager. Certains avaient des pancartes. Je lisais mon prénom et VEGAN MARATHON en lettre capitales .
J’essaie de saluer tous les supporters mais à force de zigzaguer d’un côté à l’autre de la route, je fini par manquer le premier ravitaillement à Bastille. Mes filles et l’équipe de tournage sont là et me filment dés le début du Faubourg Saint-Antoine.
Trente cinq minutes pour faire les 5 premiers km, ça va, je suis dans mes prévisions. Sur cette distance je n’ai pas mal au pied. La foulée est longue, et je cours mezzo-pied. Logiquement j’appuie peu sur la fracture.

Des erreurs de novice

En direction du Château de Vincennes, rue de Reuilly puis avenue Daumesnil, plusieurs montées successives m’obligent à baisser le rythme. Tout de suite le pied me rappelle à son bon souvenir, mais c’est supportable. J’arrive à un bon rythme au km 10 pour mon premier ravitaillement. Il fait chaud, j’ai très soif, je prend deux bouteilles d’eau que je bois coup sur coup. C’est ma première erreur. Alors que je passe devant le Château de Vincennes, j’ais mal au ventre et j’entend d’étranges gargouillis. A tel point que je ne m’arrête pas au ravitaillement suivant. Deuxième erreur.
Au km 13, dans le bois de Vincennes, je retrouve Maïté, (une de nos militantes VEGAN MARATHON, grande marcheuse). Je ne peux pas la louper avec son coupe vent orange. Elle me mitraille de son appareil photo, puis enfourche son vélo pour aller un peu plus loin et me photographier à nouveau. Elle va pédaler ainsi pendant 9 km. Alors que les petits jeunes cherchent désespérément un coin d’ombre, notre retraité pousse son vélo sans compter vers la sortie du bois de Vincennes. Je la filme avec ma Gopro autant qu’elle me photographie.
Au km 15 un runner avec « Vegan Power » sur le tee-shirt s’approche de moi vivement : « C’est grâce à vous que je cours le marathon, courage » me lance t’il avant de s’échapper à grandes enjambées. A 11h45 j’arrive au km 15 – en deux heures – et je suis déjà cuit comme un pop corn. Ma fille s’inquiète de ma couleur cramoisie. Il fait chaud, certes, je repars avec trois bouteilles d’eau du ravitaillement suivant, une dans chaque poche et une à la main. Je me dis que la remontée de l’avenue Daumesnil en direction de Bastille va être terrible, et elle l’est. Pourtant j’accélère un tout petit peu car j’ai très envie de revoir mon équipe qui se trouve au 22eme km. Ils sont tous là au tournant de l’avenue Bourdon. Je vois d’abord mes filles qui me filment ainsi que l’équipe de tournage, Patricia mon épouse est là aussi, en plein soleil (ça va se payer le lendemain, vive les insolations). Marco et toute l’équipe du CCE2A ainsi que Régis et 269 Life France sont là, donnant de la voix, drapeaux d’ALF, et bannières au vent. Eux aussi sont en plein soleil depuis ce matin. Avec la chaleur, ma vitesse a un peu baissé dans les bois, ce qui a accentué ma douleur. Pour un coureur de mon gabarit la pression exercée en course sur mes jambes peut aller jusqu’à 1346kg (12 X113).
Depuis le 15ème km la douleur est vive, pourtant je passe le 22e sourire aux lèvres. Mes courageux supporters attendent en plein soleil. En arrivant à leur hauteur, je leur fais une bise à tous et je les remercie vivement. Je ne suis pas certain qu’ils mesurent à quelle point leur présence est cruciale.
Je repars donc le coeur léger, me disant que j’ais déjà parcouru plus de la moitié du marathon, et qu’un semi je sais faire. Ma joie est de courte durée, je sombre entre le quai des Célestins et la Voie Georges Pompidou. Les descentes et les remontées des tunnels ont raison de mon stoïcisme. Je m’interroge : « vais-je arriver encore à tenir longtemps ? ». J’ai l’impression qu’une armée de démons se glisse sous mon pied pour enfoncer des épées. La douleur irradie mon pied, mon mollet, le devant de la jambe et jusque dans les bras.

Une haie d’honneur

4h20 de course, et je n’ai jamais couru plus longtemps. La température culmine à 25° soit 10 degrés de plus que la veille. J’ai l’impression que ma peau est brûlée sur chaque partie de mon corps. Ma fréquence cardiaque est à 150 alors que je ne cours plus qu’à 6,5 km/heure. J’ai de mauvaises pensées. Mes tests à l’effort ont démontré que j’ai une capacité cardiaque digne de certains champions (380 watts). Il n’en est pas de même de l’hypertension. Lors des tests à l’effort j’étais à 160 au repos grimpant jusqu’à 240 vers la fin du test. Et nous n’étions certainement pas dans des conditions aussi extrêmes. A ce moment là, je me dis qu’un AVC n’est pas si improbable. Bon ok, je chasse cette idée rapidement (merci coach pour la méditation), et je me concentre sur le km 30, c’est-à-dire le mur du marathon, où devait m’attendre Laurent le coordinateur de L214, ainsi que mon équipe de tournage et ma famille.

 

Je m’efforce de visualiser ce moment, alors que je vois autour de moi les ambulances défiler (plus de 1000 interventions dans la course), et des sportifs allongés ou assis au bord de la route. Arrivé au 30 kilomètre rien, personne. J’ai un moment de blues, mais je ne m’arrête pas. Arrivant presque au km 31, j’aperçois mes filles et les caméras, qui valdinguent de toute part. Je cherche les miens du regard, ce qui semble un peu contrarier mon chef opérateur. Laurent a installé tous le monde devant la maison de la radio, et là surprise, une véritable haie d’honneur m’attend. Les militants hurlent « Magà, Magà! ». Les militants de part et d’autre de la route, brandissent des pancartes avec mon nom dessus, ou mon visage. Dire que je suis heureux de voir ces visages amis est en-dessous de la vérité. Moment de joie intense, qui se concrétise par des embrassades et des effusions. L’espace d’un instant j’oublie la course. Le militants me suivent sur plusieurs mètres,  insistent pour prendre une photo. Je ne peux rien leur refuser. Je fais quelques pas encore en tenant Laurent par l’épaule. Je suis impressionné par la détermination de ces militants, restés des heures en plein soleil. Laurent a bien œuvré. Il a préparé cette organisation pendant des semaines, confectionné des affiches et mobilisé les troupes. Tant d’attention, j’étais vraiment touché.
Les militants débordent le personnel chargé de la sécurité. Je poursuis ma route avec Ondalina et Ariakina et les militants qui m’ouvrent la voie. Un tambour résonne, un mégaphone crachote, le compteur officielle tourne toujours, nos caméras filment. Encore 10 mètres et je serais marathonien.
La ligne est franchie, nous crions, pleurons, les AIO résonnent, la sécurité s’énerve, une réussite totale, un grand moment d’émotion. Ces 11 mois de préparation m’ont transformé, guéris. Après le marathon, je me suis aperçue que les apnées avaient disparues, j’ai donc rendu le masque avec un grand soulagement après des années de galères. Le même jour je recevais ma médaille de Finisher. Cette médaille l’organisation du marathon finira par me la décerner et je la remettrai à l’association CCE2A entouré de tous le clan VEGAN MARATHON. J’aime la justice l’idée de courir pour les humains et  pour les animaux. Le marathon est une voie de l’humilité, du courage et de l’empathie, des vertus indispensables à la préservation du vivant. Mon nom est Magà Ettori, je suis VEGAN MARATHON. AIO le CLAN, AIOOO !

Double marathonien, quel chemin parcouru

Ce qui restera à jamais gravé dans ma mémoire ? J’ai initié VEGAN MARATHON (la plus grande équipe de runners véganes et végétariens), et j’ai porté nos 44 champions jusqu’au Finish du Marathon de Paris 2018 ! Voilà ce qui me procure une joie incommensurable. Toutes les runneuses et les runners qui se sont présenté.e.s à cette course mythique sont tou.te.s Finishers. Mon objectif a été atteint, et je suis très fier du résultat de l’équipe. La team VEGAN MARATHON compte désormais 44 marathoniens supplémentaires. Ce n’est qu’un début.

Quant à moi, je suis double marathonien. En tant que sportif, j’ai vécu cette performance comme un rêve. J’ai couru tel un somnambule 44 kilomètres d’affilés, sans même m’en rendre compte. Comment ? Suivez-moi dans ce récit.

L’aventure collective a commencé, quand s’est achevé mon challenge personnel le 9 avril 2017. L’année qui suivit fut un véritable tsunami pour le développement de VEGAN MARATHON en tant que structure associative. L’Ong est à présent ancrée dans 18 pays. La vague s’est glissée sous mes pas alors que je passais la ligne du marathon, s’est élevée délicatement et m’a emporté jusqu’à des sommets vertigineux. Ce qui en terme moins poétique, se résumerait par des milliers d’heures de travail, de contacts, d’échanges, de discussions, de constructions, de réflexions, de réalisations.

Au lendemain de ma course, VEGAN MARATHON enregistre un nombre d’adhésions sans précédent. De nombreux athlètes s’inscrivent pour participer au Marathon 2018 aux couleurs de VEGAN MARATHON, des coaches viennent nous aider, une bonne vingtaine. La partie n’est pas gagnée pour autant. Malgré les conseils de nos coaches, et les encouragements du CLAN VEGAN MARATHON, beaucoup de runners n’iront pas au bout de leur préparation. Pourquoi ? Pour être direct, je dirais que certains n’ont pas eu la régularité nécessaire à ce type de préparation, et que d’autres ont été blessés. Dans ce cas-là il n’y a rien à dire, c’est la loi du sport et des compétitions. Il faut être prêt le Jour J, si ce n’est pas le cas vous manquez la compétition. Peu importe votre niveau, votre talent, vos compétences, la seule vérité de la compétition c’est d’être performant le jour de la compétition.

Alors que les athlètes se préparaient, chacun à sa manière, l’association grandissait. Sport et véganisme, le cheval de bataille de VEGAN MARATHON était au centre de l’attention générale, et j’en  étais le premier surpris. J’ai donc décidé de m’investir un peu plus dans cette aventure. J’ai repoussé tous mes films en cours (au grand désespoir de ma production dont les caisses allaient fondre comme neige au soleil) et m’atteler à la tâche. Comme à l’accoutumée ma famille m’a suivi dans mon engagement, à commencer par mon épouse qui s’est mise en disponibilité. Nos ami.e.s et de nombreux membres de l’association se sont investis également, certain.e.s au delà du raisonnable. Et le résultat  fut à la hauteur de nos espoirs.

Mes entraînements se sont poursuivis pendant un an, avec une régularité métronomique. J’ai progressé, un pas après l’autre. Je me suis battu, je n’ai rien lâché, ni les soirs de désespoir, ni les matins endoloris. Cette année l’hiver n’en finissait plus et la météo ne m’a pas facilité le travail. Un matin, alors que Paris affichait son plus beau ciel béton, le froid ressenti était de -15°. J’ai fait un peu mon méditerranéen, mais j’ai fini par sortir de la maison. Faisant fie du froid, de la pluie, de la neige et du vent, je suis quand même parti courir mes 30 km. J’avais l’impression que tous mes muscles étaient de pierre. Trempé, refroidi, retrempé, re-refroidi. Je mes suis arrêté deux fois, craignant chaque fois de ne plus avoir assez d’énergie pour repartir. A la première halte, j’ai acheté un autre bonnet (sec) dans une boutique de souvenir rue de Rivoli, à la seconde un cornet de frites chez un marchand ambulant. Franchement, le meilleur cornet de frites de mon existence et ce bonnet, quelle bonheur. Je suis reparti à chaque fois, et je suis arrivé au bout de mes 30km. Il y a eu aussi de grandes joies, comme pour le Semi de Boulogne.

Magà finisher

Entre 2016 et 2017, Thierry Pistorozzi (conseiller technique de VEGAN MARATHON) m’a préparé pour le marathon. Il s’agissait pour nous d’une course d’endurance. Je ne partais pas pour 42,195 km mais pour un marathon entre 5 et 6 heures. Après mon premier, marathon, pour me permettre de participer au semi de Boulogne, Thierry a entrepris de modifier ma façon de courir. Le règlement imposait de finir les 21 km en moins de 2h45. J’y suis arrivé en 2h30, soit une moyenne de 8,6km/h. Juste parfait. Fort de cette réussite, je me suis carrément envolé lors des entraînements qui ont suivi cette course, pour atteindre des moyennes entre 9 et 10 km/h sur des distances de 6 à 15 km. Je crois que pas mal de choses sont dans la tête. Bon dans le corps aussi. J’ai fait toutes mes courses depuis 25 mois avec un surpoids de 40kg. C’est exactement comme si un coureur amateur, commençait à courir à 45 ans, mais qu’il avait décidé de courir avec un sac de ciment sur le dos. Il faut être un peu fou ou très engagé. Un jour un ami m’a même « traité » d’extrémiste, ce qui m’a fait sourire. Eternel apprenti, je pense me situer à l’opposé d’un extrémiste, pourtant son raisonnement m’interpelle : « comment appelles-tu un homme de 45 ans, qui pèse 110kg et qui court le marathon le pied cassé ? Tout ça pour sensibiliser à la cause animale… un extrémiste « .

Oui bon, un extrémiste c’est un peu forcé le trait, d’autant que je cours aussi pour ma santé. C’est vrai que JE DÉTESTE COURIR, mais quelle incroyable, quelle fabuleuse, quelle magnifique histoire que celle de ce corps qui s’auto répare. Repousser les limites grâce au sport, et se rendre compte que l’on est capable de se guérir soi-même, là où la médecine a été impuissante. Depuis un an, je ne porte plus de masque à oxygène, après 10 ans de galère c’est un grand soulagement. La santé morale aussi est importante, et c’est ce que m’offre VEGAN MARATHON. A l’aulne de mon vécu, je mesure les progrès que font les autres membres du CLAN. Eux aussi s’engagent, eux aussi se dépassent, puis racontent leurs propres aventures dans VEGAN MARATHON MAGAZINE. Je crois que ces histoires positives sont bonnes pour mon psychisme, me motivent et me rendent meilleur. Janette et Alan Murray on été ma première source d’inspiration. J’ai à mon tour inspiré de nombreuses personnes, qui inspirent à leur tour d’autres personnes, dans un grand cercle vertueux. Quand je suis arrivé dans la dernière ligne droite du marathon j’ai vu tous nos ami.e.s (sauf Maïté on ne voyait que le bout de son nez par-dessus les barrières), j’ai aperçu Pépi et Jocelyne dans les mascottes et il m’est revenu en tête cette phrase que Jocelyne avait eu devant nos caméras : « VEGAN MARATHON c’est le nom d’une association, le nom d’un clan, le nom d’une famille, le nom de ma famille ». Comment ne pas donner le meilleur de soi-même face à un tel niveau d’engagement ?

Un marathon avant le marathon

Dernière ligne droite. Nous sommes le 3 avril 2018, il est 4h30 du matin et j’écris dans AGORA (le groupe facebook de VEGAN MARATHON) : « J-5 #VeganMarathon ». Le ton est donné.

Aujourd’hui, nous tournons avec Janette et Alan une séquence de Finisher au superbe stade le Gallo de Boulogne-Billancourt. Pierre-Christophe Baguet, le maire nous a soutenu pendant tout ce tournage. Je dois avouer que c’est le dynamisme et le bienveillant soutien d’Isabelle Dapremont (conseillère chargée du Rayonnement Culturel de la Ville) qui m’a convaincu de faire une grande partie du tournage dans cette ville, bordée par le bois de Boulogne. A l’origine nous avions prévu un tournage dans le 16e arrondissement de Paris, mais les élus de cet arrondissement n’étant pas des foudres de guerre, nous avons pris la direction de « Boulbil ».

Ce tournage est l’occasion de constater une fois de plus les qualités de nos membres. De Gabrielle notre doyenne runneuse de VEGAN MARATHON (94 ans) à Camille, en passant par Lionel, Etienne, Maité (qui courait pour la première fois depuis des années), et bien entendu Alan et Janette, toute les interviewes sont hyper intéressantes. Alan et Janette sont très à l’aise devant les caméras. Alan est un peu plus en réserve. Janette est vive, expansive, colorée, rayonnante, solaire. Un caractère qui lui a permis de faire une farce à la faucheuse quand on lui a prédit 6 mois à vivre. C’était il y a 15 ans, avant que ce couple hors normes ne court 366 marathons en 366 jours.  J’ai hâte de faire découvrir les images de Finisher. Le film sortira le 10 avril prochain, 4 jours avant le marathon de Paris 2019.

« J-4 #VeganMarathon », nous lançons notre nouveau projet : l’Institut du Sport et de l’Alimentation Végétale (INSAVE). Encore un rude challenge en perspective. Avec ce lieu que nous souhaitons créer en Ile de France, nous espérons vraiment pouvoir aider les véganes à devenir sportifs et les sportifs qui le souhaitent à devenir véganes. Il faut quand même se dire que 38% des français se présentent comme flexitariens et 5% comme des véganes. C’est dire l’ampleur de ce mouvement qui est appelé à grandir encore sous l’impulsion des sportifs (64% de la population française). J’ai le pressentiment que l’INSAVE sera d’une importance capitale dans les années à venir.

« J-3 #VeganMarathon », le salon du Running ouvre ses portes, c’est juste impressionnant. Toutes les marques sont là, le temple du Running brille de mille feux et VEGAN MARATHON est partenaire officiel de ce salon et du Marathon de Paris. Dans ce domaine aussi, quel chemin parcouru en un an. Charlotte Duthu, Olivia Charlet, Magali Paris et Yves Douieb, nos Vg-Coaches sont là pour conseiller les visiteurs du salon avec des séances de coachings individuels sur le thème de l’alimentation végétale et du sport. Yves donne un magnifique cours collectif : le défi cardio Vegan Marathon. Sur scène il est accompagné par Yohan et ma fille Ondalina. Ariakina mon autre fille, filme tout ça avec brio. Elles sont toutes les deux à leur affaire. Dans les participants à l’entraînement, on notera la présence de Janette Muray et d’une abeille géante qui fait du Show-Beebiz.

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« J-2 #VeganMarathon », nous revoilà au salon du Running. La tenue et la qualité de ce salon sont proprement stupéfiants. Rien n’est laissé au hasard pour accueillir près de 100000 visiteurs. Sur le Stand Maïté, Patricia et Maxime sont à la barre. A 19h nous sommes conviés à intervenir avec Janette et Alan pour un conférence intitulée : « Life is a marathon », le crédo de VEGAN MARATHON. Quasi aphone, je plaisante avec mon auditoire en mimant un remake du parrain. Chancia en brillante traductrice se fait le relais des propos de Janette et Alan. Andreas de chez ASO s’assure du bon déroulement de la conférence. Avec Julie et Camille ils sont nos interlocuteurs pour tout ce qui concerne la logistique du salon. Tous les trois sont très professionnels et le salon se déroule à la perfection, qu’ils en soient ici remerciés. Toutefois, le maître d’oeuvre de ce partenariat est Thomas Delpeuch. Sa gentillesse, son dévouement à son entreprise, ses connaissances techniques, et sa passion pour son métier ont été des alliés précieux.

« J-1 #VeganMarathon », le salon du Running ouvre ses portes pour le dernier jour. Magali, Xavier, Etienne, Maé, Benoit vont renseigner les salonniers et collecter les adhésions pendant que nous filons au salon végane du 104, dont nous sommes également partenaires. Là nous sommes sur une autre échelle. Nous sommes loin de l’organisation sans failles du salon du Running. Pendant les semaines qui ont précédé ce salon végane, nous avons été de loyaux partenaires. Nous avons communiqué largement sur le salon, envoyant nos militants aux 4 coins de l’île de France pour déposer plusieurs milliers de flyers, sans parler des articles dans VEGAN MARATHON MAGAZINE et des réseaux sociaux. Un dévouement qui ne semble pas avoir touché les organisateurs du salon, puisque le retour a été un peu ingrat.

La veille Yves qui installait notre stand au 104 me téléphone pour me dire : « tu sais, ils nous ont mis dans une cave. Les visiteurs ne peuvent pas nous trouver ». En arrivant dans le salon, je constate que Yves n’en a pas rajouté. La fête fut plus maussade, d’autant que les problèmes logistiques se multipliaient. La journée fut difficile et je quittais le salon fatigué et de très mauvaise humeur. Le temps de ranger le matériel et nous voilà tirant avec plusieurs militants un chariot de 5 mètres. Cela faisait 20 heures que j’étais sur le pied de guerre, et je n’ai pas eu le réflexe de le retirer (le pied), quand l’immense chariot me roula dessus. Bien entendu à l’endroit précis de la cassure. J’ai fermé les yeux, j’ai respiré, respiré, respiré, j’ai poussé le chariot sous le regard désolé de mes camarades, et nous sommes rentrés chez nous. A une heure du matin, j’étais enfin dans mon lit, pensant au marathon et la chaîne humaine. Je m’endors comme une masse pour 3h30.

« Jour J #VeganMarathon », à 4h30 je suis tiré du lit par la sonnerie du téléphone. Un coureur est bloqué par la grève des trains et me demande de l’aider. A 7h30 j’ai reçu au moins 200 coups de téléphone de ce type, emails, et textos. Les requêtes sont incessantes. C’est là que les qualités d’organisatrice de mon épouse font la différence. Nous arrivons à répondre à tout le monde, aussi bien aux participants de la chaîne humaine qu’aux runners de VEGAN MARATHON. Un premier exploit.

A 7h45, avec mes filles et mon épouse, nous rejoignons une partie de l’équipe de tournage de Finisher au rond-point des Champs-Elysées, mais aussi des runners et des militants de VEGAN MARATHON. Dans l’équipe du matin, si certains ne sont pas venus de trop loin (Maité, Jocelyne, Emilia, Brice, Xavier, Caroline, les K&M) d’autres ont fait un voyage « fort fort lointain » (comme dirait Shrek) pour participer à la chaîne humaine ou pour courir au couleurs du clan, à l’instar de Bastien (Toulouse), Gisèle (Lyon), Laurence (Corse), Gabrielle (Suisse), Pépi et Inès (Belgique) et bien entendu  nos champions du monde Janette et Alan (Australie). En réalité dans les 44 runners nous avons des runners de toutes les nationalités.

A 8h10, le AIO, notre cri de ralliement résonne sur une des plus belles avenues du Monde, puis nos supporters s’installent au niveau du métro Franklin Roosevelt pour donner de la voix au passage des 50000 coureurs. Les 44 runners de VEGAN MARATHON ont rejoint leurs SAS de départ et les départs vont se faire par vagues successives. J’ai choisi le SAS des 3h30. Oh non pas que j’ai la prétention de faire le parcours dans ces temps,  mais en partant avant, j’espère pouvoir prendre de l’avance et m’occuper de tout le monde. D’ailleurs le téléphone n’arrête toujours pas de sonner. Sur les photos que je verrais plus tard, Patricia et moi avons souvent un téléphone collé à l’oreille. Alors que je m’apprête à m’élancer, c’est Pauline qui me téléphone, la présidente d’Info Végane. Elle n’arrive pas à rejoindre le lieu de rendez-vous. Nous sommes partenaires d’une dizaine d’associations de la cause animale qui ont prévu d’encourager les coureurs, en se plaçant à des endroits stratégiques du parcours du marathon. En définitive, ce choix – dont je suis responsable – allait s’avérer catastrophique. Le salon végane du 104 se poursuivant le dimanche, certaines associations qui nous avaient soutenu pendant un an ont fait le choix de ne pas venir à notre point de rendez-vous mais plutôt d’aller au 104. D’après ce que j’ai compris, elles étaient en manque de militants pour être sur les deux sites à cause de la grève des transports. D’autres associations étaient présentes mais n’avaient ni banderoles, ni rien de suffisamment visible pour nos runners. De fait elles étaient noyées dans la foule, comme j’ai pu le constater par la suite. Mené par Laurent Simonpietri, L214 a bien entendu une visibilité supérieure aux autres structures, orange is a new black.

A quelques secondes du départ, je prend un long moment pour moi. Je fais le point sur mon état de santé juste avant le départ. J’ai un peu de mal à respirer, à cause d’un refroidissement qui semble être tombé sur les poumons. Depuis trois semaines, j’ai le nez bouché et mal à la gorge. A telle enseigne que j’ai fait mes deux conférences les jours précédents complètement aphone. Les conférences ont été filmées, et ont n’entend à peine le son de ma voix. Si nous utilisons un jour ce document filmé, il va falloir le sous-titrer. Je continue mon introspection. Je me suis tordu la cheville gauche en septembre dernier, et elle est toujours douloureuse depuis. Enfin le pied droit me lance (celui qui est passé sous le chariot), j’ai l’impression de sentir mon coeur contre le bord de ma chaussure. Je me dis qu’en définitive tout ça n’est pas trop grave, et que l’année précédente c’était bien pire avec mon pied cassé. De toute manière mon téléphone sonne, et le départ est donné. Je m’élance, et dévale à toute vitesse les Champs-Elysées. Je vois nos supporters, et surtout j’entends Gisèle qui crie sans discontinuer dans son mégaphone : « VEGAN MARATHON AIO, VEGAN MARATHON AIO,  VEGAN MARATHON AIO,  VEGAN MARATHON, AIO… ». La voix s’éloigne.

Mon téléphone sonne, je répond en courant, il s’agit d’un membre de VEGAN MARATHON qui veut entrer dans le salon végane du 104, je le renseigne. Un double appel, et c’est un runner qui cherche comment entrer dans son SAS. Je lui explique comment y aller. Les appels se succèdent, et j’ai l’impression d’être un standard téléphonique. Cela  semble amuser certains runners mais d’autres beaucoup moins. Je cours avec des personnes plus rapides que moi, et en plus je suis pendu au téléphone. J’essaie de ne pas les gêner mais c’est carrément impossible, ils me poussent et me déborde alors que j’ai l’épaule collée contre un mur. J’ai l’impression d’être Simba emporté par un troupeau de buffles. Franchement c’est plus agréable de courir avec des personnes de son niveau. Et je ne parle pas des ravitaillements, où je suis témoin de scènes complètement grotesques. Des runners qui prétendent faire un marathon en 3h30 (donc pas des pros) et qui sont d’une agressivité incroyable. Au premier ravitaillement, deux athlètes en sont pratiquement à se battre, c’est vraiment ridicule. Qu’est-ce que ce serait s’il y avait des enjeux.

Arrivé à mi-course, c’est-à-dire au niveau de Bastille je n’ai pratiquement pas lâché mon téléphone. Et pire (ou mieux) je ne me suis même pas rendu compte que je courais. Certes les quintes de toux me gênent de plus en plus, oui la chaleur commence à grimper, mais le bon point c’est qu’avec cette intense activité téléphonique, je n’ai pas fait attention que j’avais vraiment mal au pied. Comme l’année précédente j’ais des lames qui s’enfoncent dans le pied droit (celui du chariot), mais je ne fais pratiquement pas attention à la douleur. Mon esprit est ailleurs. Je continue à téléphoner pour savoir, si tout le monde est parti, si nous n’avons pas d’abandons, si nos élites se rapprochent de la fin du parcours. Ma pensée est à tout autre chose que la course. Si j’avais discuté avec mon coach à ce moment-là, il m’aurait certainement dit que je ne courais pas en pleine conscience, que mon esprit n’était pas à ma tâche. Et pourtant si. Ma tâche n’était pas de faire un record personnel au marathon de Paris, ma tâche était de porter mes 44 runners au Finish, et j’étais complètement concentré sur ma tâche. Le reste du Marathon s’est déroulé comme si je courais dans de la ouate et que j’avais enclenché le pilote automatique. Quand j’avais trop mal je marchais, quand ça allait mieux physiquement je courais, sans plus.

Je suis arrivé au bout de mes 6 heures de course comme ça, sans vraiment m’en rendre compte. A l’arrivée les membres de VEGAN MARATHON et les autres associations sont là, pour nous encourager dans la dernière ligne droite. Un petit passage pour saluer mes ami.e.s, et je file en direction de la ligne finale. L’émotion est immense, mais mon inquiétude est pour nos runners qui ne sont pas arrivé.e.s. Je donne rapidement une interview pour une TV, et j’explique que je vais retourner pour aller chercher les derniers coureurs de VEGAN MARATHON comme j’avais prévu de le faire. Anne So arrive, elle pleure et tremble, pensant ne jamais pouvoir finir le marathon. Elle est vraiment touchante.

Janette et Alan arrivent à leur tour, main dans la main (comme ils le font depuis 50 ans) Finisher de leur 500e marathon. Je suis très fier de les voir courir aux couleurs de VEGAN MARATHON. Nous allons rapidement prendre une photo avec les autres runners-finishers de VEGAN MARATHON et nos fidèles. Certains runners sont déjà partis, épuisés par leurs efforts. Alors que nous nous lançons dans un énième « AIO » je me rappelle que l’an dernier j’étais le seul à porter le maillot de VEGAN MARATHON, quel chemin parcouru, mais quel chemin parcouru…

42 runners sont rentrés, j’ais pratiquement gagné mon pari. L’avant-dernière est Camille. Je la rattrape quand elle sort du Bois de Boulogne, et je la suis dans sa course finale avec Alex son fiancé. D’autres membres de VEGAN MARATHON sont avec nous, et nous l’encourageons. Dans le lot, il y a Karine qui porte un sac de bouteille en plastique (presque) aussi grand qu’elle. VEGAN MARATHON, pour aider le Marathon de Paris a proposé aux organisateurs d’intervenir dans le ramassage de bouteilles. L’année dernière j’avais pu constater que c’était extrêmement difficile de compter uniquement sur le civisme de 57000 runners. Le Marathon avait pourtant très bien fait les choses, il y avait des bacs de recyclage jusqu’à 700 mètres après les ravitaillements. Rien n’y fait. Certains runners trouvent le moyen de balancer les bouteilles ou les restes des ravitaillements n’importe où.

Le compteur du Marathon tourne toujours, mais les grilles sont fermées. Patricia Prêt (la dernière runneuse n’arrive toujours pas. Je croyais qu’elle avait jeté l’éponge. Quand elle est apparaît soudain au rond-point de la porte Dauphine, je crois à un miracle. Patricia d’une façon très mystérieuse a réussi à passer la sécurité. Cette fois-ci c’est certain il y a un miracle du marathon ! Vu que j’étais de l’autre côté de la grille, nous courons tous les deux les 200 derniers mètres. Elle est poursuivie par une personne de la sécurité, mais elle arrive au bout de sa course. Notre 44eme runneuse passe la ligne d’arrivée.

Je regarde ma montre qui indique 44 km. C’est décidément le chiffre du jour, même si je ne sais pas comment c’est possible de courir 44 km alors que le parcours fait 42,195 km. Enfin si je sais, il suffit d’avoir couru le marathon avec un téléphone à la main, d’avoir pas mal zigzagué, et enfin d’avoir ramené comme je l’avais promis toutes nos ouailles au bercail. Si j’ai apprécié ce marathon ? Comment dire ? C’est au delà de ça. J’ai effectivement ressenti plus de joie après l’arrivée de la dernière runneuse que pour ma propre course, car je savais que cela récompensait un an d’efforts communs. En ce qui me concerne, j’avais tout de même un petit regret. Certes j’avais obtenu ce que je voulais avec nos 44 runners, mais que dire de ma propre course ? Cette course où tel un ange je sautillais de nuage en nuage avec ma lyre, pardon avec mon téléphone à la main, avait un je ne sais quoi d’injuste pour ceux qui m’ont accompagné dans mes efforts sportifs, et en premier lieu mon coach.

J’ai le sentiment, que nous n’avons pas été récompensés pour nos 25 mois d’entraînements. Pas tellement au niveau de mon temps, mais plus au niveau de mes sensations. Je suis bien incapable de raconter mon marathon dans le détail, car en fait je ne l’ai vécu que par procuration. Et je n’aime pas avoir de regrets. C’est pourquoi, j’ai décidé de refaire un marathon immédiatement après. Il s’avère qu’il y a un marathon en région parisienne trois semaines plus tard. Mon coach m’a prévenu que je ne suis pas (plus) prêt. Selon lui, il aurait fallu que je m’arrête une quarantaine de jours pour repartir de plus belle. Je sais qu’il a raison, mais il m’arrive de défier la raison. Selon mon coach je vais faire au mieux 6 heures, car mon corps n’est pas remis. Malheureusement le marathon de Senart doit être bouclé dans les 5h30, sous peine de ne pas être classé et pire il faut passer les premiers 10km en 1h20 et le semi en 2h45. Ce qui revient à dire que pour entrer dans les clous je dois être au même niveau que pour le semi de Boulogne, c’est impossible. Soit ! J’en accepte les augures, je ne serais pas classé. Je ne vais même pas essayer, je vais juste courir pour moi, et finir en 6 heures.

J’ai pris cette décision de recourir un marathon le lendemain du marathon de Paris. J’avais toujours mal au pied droit, je suis allé passer une radio et je n’avais rien de cassé. Pas d’autres cassures que celle de l’an dernier. Si mon morceau d’os se promène toujours dans mon pied, cela ne justifie pas un arrêt de trois mois comme l’an dernier. Voilà qui était encore une victoire, je vais mieux, dans tous les domaines. En sortant de la radio, je vais faire ma course de « décrassage ». Au bout de 5 km je me suis rend compte de quelque chose de surprenant. Très surprenant même. Alors que ma cheville m’a fait souffrir pendant 8 mois, le lendemain même du marathon toute blessure a disparue. Une prouesse du corps ? De l’esprit ? Je n’en sais rien, mais je vais essayer de comprendre. Voilà une nouvelle aventure intellectuelle et physique qui s’annonce, et quel chemin à parcourir. Comme dirait Gisèle : « VEGAN MARATHON AIO ! »

Les raisons de la victoire

Je ne vais pas faire durer le suspens, une vingtaine de jour après le marathon de Paris, j’ai couru aujourd’hui le Marathon de Senart en 5h20 ! Vous ne voyez pas l’exploit ? Je vous suggère la re-lecture de mon premier Marathon de Paris en 6h32 puis du second Marathon de Paris en 6h14. A ce rythme là, je vais certainement, pouvoir participer au Jeux Olympiques de 2050. Plus sérieusement avec mes 110kg, je ne pouvais pas espérer mieux. J’ai conscience d’être arrivé à mon maximum de mes possibilités (avec ce poids), donc je très très heureux de cette performance. La suite passera nécessairement par une nouvelle perte de poids… super, un nouveau challenge.

Alors pour revenir au titre de l’article, à part l’emprunt à Steinbeck (The Grapes of Wrath), je dirais que les raisons de la victoire sont plus qu’évidentes : une relation de confiance avec un grand professionnel (mon coach et ami Thierry, Conseiller technique de VEGAN MARATHON), une régularité sans faille à son programme pendant 25 mois, une cause pour laquelle je suis fortement engagé (l’exploitation animale), et une tribu ou plutôt un CLAN qui me donne la gnaque au quotidien. J’ai oublié quelqu’un d’important ? Mes plus humbles excuses, c’est le martèlement pendant 42,195 km qui me trouble, ou la fatigue.

La régularité sans faille, c’est ma qualité N°1 quand je m’engage, je m’engage. Une fois sur les rails, c’est un remake de « Unstoppable » de Tony Scott mais avec un conducteur à bord. Mon défaut c’est l’absence de lâcher prise et la difficulté à déléguer qui en résulte. Organiser/participer à un tournage, trois conférences, deux salons et un marathon (si vous ne voyez pas de quoi je parle, je vous suggère la re-lecture de mon second Marathon de Paris en 6h14), c’était peut-être un peu beaucoup, même pour moi. Mais avais-je vraiment le choix ? Certainement, vu le nombre et la qualité des membres de VEGAN MARATHON, j’aurai pu mieux faire. Mais que voulez vous ? Nul n’est parfait.

En conclusion, ce Marathon de Sénart est une belle performance pour votre dévoué serviteur, mais ce fut surtout une grande et belle joie pour l’orpailleur de relations humaines que je suis. J’ai pu constater que les organisateurs de ce marathon étaient d’une grande sincérité et d’une immense bienveillance. Résultat, toute la manifestation est d’une grande sincérité et d’une immense bienveillance. Vous comprendrez que j’étais à mon affaire aujourd’hui. J’ai cultivé et rendu les applaudissements et les signes d’amitiés par brassées et je suis certain que cet engouement à ajouté une raison supplémentaire à cette belle victoire, dont je suis très fier.